"Poète, enivre-toi du murmure des eaux, Et du parfum des fleurs et du chant des oiseaux (...)" [Couturier]

Jour 3 : 28/12/2018

"Viens-tu, désabusé des vanités humaines,
Promener tes ennuis sur ces plages lointaines
Et, sous un plus beau ciel, rêvant des jours meilleurs,
Dans l'ombre et le silence assoupir tes douleurs ?
Tu pourras fuir, au fond d'une douce retraite,
Le contact importun de la foule indiscrète :
Sur les flancs arrondis d'un gracieux coteau,
Ou dans un frais vallon, au bord d'un clair ruisseau,
Tu pourras, t'abritant sous un toit de feuillage,
Te bâtir de tes mains un tranquille ermitage."

[Extrait de "Ile Bourbon", de G. Couturier]

La sympathique soirée de la veille bien en tête, nous émergeons sans nous presser sous un ciel encore clair. Cette fois, nous prenons la route de l'Est, après un petit coup de téléphone pour nous assurer que notre première visite est bien ouverte. Ce côté de l'île est différent de ce que j'ai pu voir jusque là. Les champs de canne à sucre, dont la récolte s'étale sur 6 mois, couvrent l'horizon jusqu'à l'océan d'un côté, et font place à de véritables murs végétaux d'un vert intense de l'autre. Cette côte est en effet plus exposée aux pluies que l'Ouest, et cela lui confère un petit air tropical. Le relief est plus vallonné et le littoral plus large qu'à l'Ouest, où (comme je vous l'avais décrit dans mon article précédent) la pente de la montagne, entrecoupée de profondes ravines, semble plonger sans discontinuité dans l'onde marine.

Canne à sucre

Nous faisons stop au bout d'une belle allée de palmiers à la Vanilleraie (Ste Suzanne), coopérative (ou entreprise privée, je n'ai pas trop réussi à savoir) de vanille, à laquelle livre une trentaine de producteurs, et où la vanille est séchée et transformée.

Vue depuis la terrasse du domaine

La visite guidée nous permet d'en apprendre plus sur les secrets de cette épice, produite à hauteur de 2T par an à La Réunion (pour une production mondiale de 2000T, dont 1600 proviennent de Madagascar). Je dois faire taire un peu mon côté prof de BTS ACSE lorsque notre guide nous entretient de la partie production, en étant un peu approximatif (voire irritable) sur les aspects techniques et économiques. Mais la visée est touristique et non pas une étude de cas.

Vanilliers sous ombrière, qui permet aux touristes d'appréhender les différentes variétés cultivées, et à l'entreprise de conduire aussi des essais variétaux. Une autre technique de plantation consiste à utiliser des arbres pour tuteurs.

Pesée et conditionnement

La visite se termine par l'achat de quelques gousses pour les amis et collègues, récompensées de la médaille d'or du salon de Paris, et une dégustation de glace maison (miam!).

Nous repartons pour la partie aquatique de la journée, avec une pause vers St André pour acheter à manger (mon 1er carry). Nous voilà ensuite sur la route étroite et cabossée qui louvoie entre les champs de canne, avant d'arriver au parking à partir duquel l'on peut accéder rapidement à Bassin la Paix (Bassin la Mer étant un peu plus loin), moyennant une descente abrupte dans des escaliers vertigineux.

Nous pique-niquons sur les rochers surplombant Bassin la Paix, dans un écrin de sérénité composé d'une cascade bouillonnante se déversant dans une vasque ceinte d'orgues en basalte. Le soleil se joint à nous par moments, et révèle une eau limpide, dans laquelle se reflètent les arbres perchés et les pailles-en-queue qui tournoient dans les airs.

Une petite baignade digestive, bien plus fraîche qu'à l'Ermitage, puis nous faisons notre petite séance cardio du jour avec la remontée des escaliers et nous dirigeons vers Bassin la Mer. Le sentier commence relativement large au bout du parking, dans les cannes, et se rétrécit progressivement, jusqu'à être envahi par la végétation par endroits. La forêt, dense, est superbe, et nous apercevons de temps en temps la rivière qui paresse en contrebas dans son lit de pierre.

départ du chemin

Vue sur la forêt

"C'est un trou de verdure où chante une rivière" [A. Rimbaud]

Il nous faut une petite demi-heure pour rejoindre le bassin, moins évident à trouver que le premier. Il ne faut pas rater le poteau "indicateur" et ne pas hésiter à s'engager dans une descente tout aussi à pic que la précédente, mais qui ne paraît absolument pas mener quelque part, les hautes marches n'étant que des roches et les racines nombreuses. Nos baskets rendent un peu périlleuse la dernière partie, sur des rochers bien glissants, mais nous arrivons finalement entières sur les berges, moins fréquentées que celles de Bassin la Paix. Une cascade nous fait face, et Candice me dit qu'il va falloir nous mettre à l'eau pour profiter d'une petite surprise.

Bassin la Mer

La haute paroi de pierre que vous voyez à gauche sur la photo ci-dessus nous cache en effet une seconde cascade, qui coule de plus haut et en un cours plus fin que celle qui nous fait face. Nous restons un moment sur les rochers à la contempler, chacune dans nos pensées, jusqu'à ce qu'une petite pluie plus s'invite. Nous repartons alors dans l'autre sens, explorer un peu l'aval en jouant les équilibristes le temps de sécher un peu. Nous récupérons enfin nos affaires pour attaquer la remontée, guère plus aidées qu'à l'aller par nos chaussures. Après avoir préparé nos affaires pour le bivouac à Mafate, la journée se termine dans une ambiance joyeuse chez les parents de Marc, pour fêter Noël en retard à coup de champagne, de plats créoles et de bûche glacée.