"Comme un enfant, bercée au bruit sourd de la houle, Ma pensée erre au gré de la vague qui roule (...)" [Azéma]

Jour 2 : 27/12/2018

"A l'heure où de la nuit l'astre mélancolique
Lave de ses flots d'or le ciel bleu du Tropique,
Sur le bord de la mer je viens souvent m'asseoir,
Et je livre mon âme à la brise du soir."

[Extrait de "Les Nuits du Tropique", Etienne Azema]

Cette fois-ci la journée commence plus tôt, puisque notre objectif est de pouvoir admirer le cirque de Mafate depuis le Maïdo, chose parfois compliquée par les nuages qui s'invitent sur les hauteurs de l'île au fur et à mesure que la journée avance. Voyageur, le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt, en particulier à La Réunion! Nous ré-empruntons donc la route de l'Ouest par le littoral, avant de quitter celui-ci. Une grosse vingtaine de kilomètres de montée nous attendent (ou plutôt, notre brave titine), sans répit ou presque. Ici, les distances ne se comptent pas tant en kilomètres qu'en minutes ou heures... Au cours de l'ascension, les maisons colorées entourées de jardins fleuris laissent place à une végétation dont le vert criant traduit des conditions climatiques estivales plus clémentes qu'aux étages inférieurs, puis à une forêt de tamarinds aux troncs secs, et enfin à des arbustes buissonnants sur la rocaille.

Tamarinds

En route vers le sommet

Lorsque nous garons la voiture, les nuages coupent déjà la ligne d'horizon, et Candice me presse de rejoindre le point de vue. Nous disposons alors de 5 minutes précieuses de vision dégagée sur Mafate, lieu inaccessible sinon à pied ou par hélicoptère, qui sera notre destination du week-end. Candice me présente les îlets et randos qu'elle a déjà eu l'occasion d'y faire tandis que je prends quelques photos. Déjà la brume s'installe, nous cachant les ravins, les bois et les divers cols et remparts. Nous marchons en direction du Grand Bénare parmi les branles verts et blancs endémiques et les genêts invasifs, l'a-pic sur notre gauche rendu invisible par les volutes blancs, mais bien présent. Nous atteignons la statue de la Vierge sans aucun signe de l'éclaircie espérée, et rebroussons chemin sur la pensée que nous aurons tout de même eu droit à 5 minutes de belle vue, ce qui est toujours mieux que rien du tout. Cela nous aura aussi permis de nous éloigner un peu du site touristique, nous donnant l'impression d'être seules au monde.

Résultat de nos 5 minutes dégagées

Marche dans la brume

Nous entamons alors la descente, quittant la fraîcheur des 2000 et quelques mètres d'altitude du Maïdo, pour retrouver la côte et ses 35°C, qui nous tend les bras à chaque virage. Cette redescente, avec pour toute vision le bleu infini de la mer et du ciel fait partie des constantes de ce voyage, dont mes yeux n'ont pas réussi à arriver à satiété.

Redescente

Par cette chaleur, une seule occupation s'impose : la plage ! Et ombragée si possible. C'est pour cela que nous choisissons à nouveau l'Ermitage et ses filaos. Une petite trempette pour finir de s'ouvrir l'appétit (mais que nous avons regrettée ensuite compte tenu de la queue qui nous attendait pour obtenir un sandwich au seul snack des environs), un casse-croûte, et nous installons le hamac tendu entre 2 filaos (enfin, Candice, parce que mes 2 années sans pratique depuis la Guyane m'ont fait oublier les noeuds ^^). Petite sieste, nouvelle baignade, mots croisés entre copines, et il est déjà temps de se diriger vers la dernière activité de la journée.

Cette activité débute par un tour dans un 4x4 hors d'âge sur une piste bosselée, en compagnie de 2 husky et de notre guide du soir, pour rejoindre le "ranch" de Shaï Ena. Il s'agirait plutôt d'un petit écrin de paix au-dessus des vergers qui précèdent la savane du cap La Houssaye, fabriqué avec soin à l'aide de containers et de bois par un homme passionné, pour ses chevaux qu'il adore. Je crains toujours un peu ce type de balade, souvent attrape-touriste et pas forcément dans le respect du cheval, mais Shaï Ena et Mano sont bien loin de rentrer dans ces clichés. Il s'agit d'un véritable homme de cheval, dans tous les sens du terme. Nous faisons connaissance avec Ruby, Heidi et Hondo, quarter-horse et appaloosa de leur état, qui nous attendent à l'ombre et à l'abri des bêtes piqueuses. Prise de contact avec la bombe Ruby dans la carrière avant le départ, gentiment pour Candice, un peu plus vite pour moi, qui ai malgré tout du mal à me remettre en tête les codes de l'équitation western. Sacrées sensations sur cette jument qui a la finesse de tête de l'arabe, mais une arrière-main bien propre à sa race, capable de parcourir le 1/4 de mile à plus de 60 km/h, et qui part au galop sur le son d'un petit bisou. Nous récupérons ensuite Heidi, qui a tendance à abuser un peu des débutants en s'arrêtant manger beaucoup trop régulièrement et qui m'est donc attribuée, et Hondo pour Candice. Notre guide monte sur Ruby, et nous voilà partis pour 2h dans la savane au-dessus du cap La Houssaye, où nous profitons de paysages, d'une quiétude, et d'une luminosité incroyables. Les chevaux sont calmes et bien dressés, et nous n'échangeons que peu de mots, parce que ce n'était pas nécessaire, durant ces instants inoubliables. Nous rentrons entre chien et loup, après avoir été témoins de l'embrasement rose/orangé du ciel dans lequel l'astre doré se couche avec panache.

Départ dans les manguiers

Après avoir dessellé et nourri les chevaux, nous terminons autour d'un petit apéro dans une ambiance de western américain, à discuter de chevaux et de tout et de rien entre de vieux cuirs, des fers rouillés, des attrape-rêve et autres vestiges du passé qui n'ont de signification que pour soi, ou rappellent un compagnon qui a partagé un temps notre vie...